De la démocratie sur Internet
S'il y a bien une chose que nous devons à Internet, c'est l'accès libre et immédiat à une source intarissable d'informations. Depuis les années 2000, avec l'émergence du Web 2.0, n'importe quel badaud disposant d'une connexion viable peut ajouter sa pierre à l'édifice et ainsi contribuer au grand ouvrage commun. Avec l'UGC et le « crowdsourcing », le pouvoir est définitivement entre les mains des citoyens de la Toile.
Malheureusement, la disparition des barrières à l'entrée sur le segment de la publication numérique s'est accompagnée d'un délitement progressif de la pertinence au profit d'un capharnaüm généralisé. Pour être publié au siècle dernier, encore fallait-il convaincre un éditeur... Aujourd'hui, convaincre sa propre conscience déontologique représente un effort herculéen. C'est ainsi que des articles réfléchis cohabitent avec les mèmes et que des remarques pertinentes côtoient les éructations de trolls congénitaux.
Internet est un espace partagé, une vaste agora qui reflète les mœurs de notre démocratie. Les élections n'y sont pas présidentielles ni législatives, mais bel et bien hypertextes. Les candidats ne sont pas des personnes physiques mais des liens. Le régime y est, en outre, représentatif.
Cette conception démocratique d'Internet nous amène à considérer le partage d'un lien comme un vote. Lorsqu'un internaute partage un lien, c'est vraisemblablement parce qu'il y voit une certaine forme d'intérêt. À ce titre, on pourrait dresser une cartographie idéologique d'un citoyen connecté à partir de ses publications. « Je pense, donc je suis » écrivait Descartes dans son Discours de la méthode. Sur Internet, ne serait-ce pas plutôt « Je partage, donc je suis » ?
Ce que nous sommes sur Internet fait corps avec ce que nous partageons. Les mauvais contenus trahissent bien souvent les mauvais citoyens, à moins que les liens ne soient capables de démagogie et de populisme...